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Soutien final au 18 mars 2020

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18/03/2020
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12 mars 2020 : la privatisation est suspendue !

Directeur de la publication : Edwy Plenel
www.mediapart.fr
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La privatisation d’Aéroports de Paris est
suspendue
PAR LAURENT MAUDUIT
ARTICLE PUBLIÉ LE MERCREDI 11 MARS 2020
En pleine crise du coronavirus, le gouvernement gèle la question de la privatisation d’Aéroports de Paris, qui « ne saurait se poser dans l’immédiat compte tenu des conditions » du marché. Mais c'est bien la mobilisation citoyenne, à plus long terme, qui constitue un obstacle majeur pour l’exécutif.
Pour tous les opposants à la privatisation d'Aéroports de Paris (ADP), qu'ils soient de gauche ou de
droite, c'est un répit, sinon une première victoire. Le gouvernement a décidé de suspendre l'opération. C'est la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye qui l'a indiqué mercredi 11 mars, à l'issue du conseil des ministres, expliquant que la question de la privatisation « ne saurait se poser dans l’immédiat compte tenu des conditions » du marché, dues à la crise du coronavirus et du pétrole. « Compte tenu des conditions de marché, de toute façon, nous serions un bien mauvais gestionnaire si
nous faisions le choix immédiat de céder les actifs et nos participations dans ADP », a ajouté la secrétaire d’État, faisant valoir que « l’instabilité actuelle des marchés » montre « que les conditions » ne sont « pas du tout favorables pour le moment à une quelconque opération de privatisation et en particulier pour ce qui concerne ADP ». Elle n'en a pas dit plus. Et s'est gardée, en particulier, de commenter le fait que les opposants à la privatisation d’ADP n’ont pas réuni les 4,7 millions de signatures nécessaires pour l’organisation d’un référendum. Ce silence est assurément « bavard » : le
gouvernement sait qu'une fois la crise du coronavirus surmontée, cette privatisation à laquelle tient tant le chef de l’État risque de buter sur l'obstacle de la mobilisation citoyenne, d'une ampleur de toute façon inédite.
Ce que révèle la campagne pour la collecte des signatures n’a pas grand-chose à voir avec une défaite
des opposants. Elle met plutôt au jour l’anémie de notre démocratie, dont les règles institutionnelles sont ainsi construites qu’elles permettent le rejet d’un référendum, bien que la demande soit très forte et
vienne de multiples horizons dans le pays. Et puis surtout, elle a souligné un phénomène nouveau, sur
lequel il faudra compter à l’avenir : la défense des biens communs est devenue, en France, très populaire. Certes, les chiffres sont de but en blanc trompeurs. À la suite du dépôt le 10 avril 2019 par 248 parlementaires socialistes, communistes, insoumis et républicains d’une proposition de loi, présentée en application de l’article 11 de la Constitution et visant à garantir le « caractère de service public national de l’exploitation des aérodromes de Paris », le nombre exigé pour déclencher un référendum d’initiative partagée (RIP) n’a pas été atteint. Neuf mois après l’ouverture d’un site Internet par le ministère de l’intérieur, il aurait fallu que 10 % du corps électoral signe la proposition de loi, soit
très exactement 4 717 396 citoyens inscrits sur les listes, d’ici à ce jeudi 12 mars à minuit. Or, au
dernier décompte arrêté au 4 mars par le Conseil constitutionnel, le nombre des soutiens s’établissait
à 1 116 000. La clôture de la période de recueil des soutiens devrait intervenir avec près de 1,2 million de signatures, alors qu’il en aurait fallu quatre fois plus. Il faut pourtant mesurer les raisons de ce résultat. D’abord, le pouvoir a multiplié les embûches – et tout particulièrement le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner –, pour que la signature de la proposition de loi relève de la prouesse, même pour les plus accros à l’informatique. Tous les médias ont publié d’innombrables témoignages de citoyens, surtout au début de la collecte, qui ne parvenaient pas à aller au bout du parcours d’obstacles et finissaient par renoncer à signer. Parfois, on ne trouvait pas le nom de la commune dans laquelle on était inscrit. Ou alors, on utilisait un mauvais code d’identification de la ville de naissance
– au début il s’agissait du code d’identification Insee, puis c’est devenu le code postal – et la requête mal formulée était bloquante ; il devenait alors impossible d’aller plus avant dans la procédure. Il y avait aussi des règles strictes pour les majuscules, les minuscules, les accents, les cédilles ou les traits d'union dans la rédaction des noms et des prénoms. Et pour finir, même quand on avait fait un parcours
sans fautes, il est souvent arrivé que le système ne trouve pas les personnes. Ou alors, après des heures d’efforts, lorsque l’on pensait avoir enfin réussi et pouvoir signer d'un dernier clic : pas de chance ! Un bug nous condamnait à tout recommencer de zéro. Quand ce n’était pas cet insupportable protocole de sécurité captcha qu’il fallait recopier mais qui était si difficilement lisible qu’il fallait s’y reprendre à huit ou dix fois pour y parvenir. Bref, le gouvernement a fait en sorte qu’il y ait le moins de soutiens possible. Autre entrave spectaculaire : les promoteurs de la proposition de la loi n’ont pas pu faire sur Radio France les spots publicitaires qu’ils avaient conçus pour inviter les citoyens à y apporter leur soutien. Comme Libération l’a raconté, la direction de Radio
France, dont la PDG est Sibyle Veil, connue pour sa proximité avec Emmanuel Macron, a «émis des
réserves sur la possibilité juridique, au regard de la réglementation relative à la publicité que Radio
France doit respecter ». Une justification confirmée par le porte-parole de Radio France, également
interrogé : « Il n’y a pas, pour l'heure, de budget, pas d’annonceur, pas de message, et la publicité est
quelque chose de très réglementée à Radio France. On a simplement émis une réserve, en attendant d’avoir plus d’informations. »
Les promoteurs du projet ont alors saisi le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), mais ce dernier
a fait savoir, par la bouche de son président, Roch-Olivier Maistre, qu’il ne ferait rien. Dans un
communiqué, il a indiqué que « la loi n’a pas prévu de dispositif particulierpendant la période de
recueil des soutiens » et qu’il appartenait donc « aux médias audiovisuels, publics ou privés de déterminer librement les modalités d’information des citoyens,
dans le respect des règles de pluralisme et d’honnêteté de l’information en vigueur ». Or, pendant toutes ces tractations, qui se sont soldées par un refus, les antennes de Radio France ont été  inondées, exactement au même moment, de publicités de la Française des jeux, chantant les louanges de sa
très sulfureuse privatisation, et invitant les Français à y souscrire.
Deux poids et deux mesures, donc : la campagne de communication pour la privatisation de la Française des jeux a été encouragée et financée sur fonds publics, tandis que la campagne citoyenne contre la privatisation d’ADP a été étouffée dans l’œuf.
La promesse non tenue de Macron Pour finir, les promoteurs du référendum n’ont donc compté que sur eux-mêmes pour faire circuler une petite campagne de communication (pas franchement réussie ni attrayante) sur les réseaux sociaux.
Ces entraves à la volonté populaire ne sont pas les seules. Car, dans de nombreux pays, la possibilité
d’avoir recours à un référendum est beaucoup plus simple. Le cas le plus emblématique est évidemment celui de la Suisse où, comme le rappelait une récente enquête de notre collègue Romaric Godin, la consultation des citoyens est inscrite de très longue date dans les mœurs démocratiques du pays sous deux formes, celle de « l’initiative » (les citoyens proposent une réforme) et celle du « référendum » (les citoyens contestent une réforme). Et la procédure n’a strictement rien à voir avec celle
du référendum d’initiative partagée (RIP) en vigueur en France depuis 2008 et jamais à ce jour utilisée –
et pour cause ! En Suisse, dans le cas du référendum, il suffit que 50 000 citoyens (soit 0,95 % du corps
électoral) le demandent dans les cent jours suivant la publication officielle du texte visé. Et dans l’autre
procédure suisse, les membres d’un comité visant une révision de la Constitution ont dix-huit mois pour
récolter 100 000 signatures (environ 1,8 % du corps électoral).
Pris dans les turbulences du mouvement des « gilets jaunes », qui revendiquaient une vaste refondation de notre démocratie et une révision constitutionnelle pour créer le référendum d’initiative citoyenne – le fameux « RIC » acclamé sur des ronds-points aux quatre coins du pays –, Emmanuel Macron a, comme souvent, fait mine d’avoir entendu la colère du pays, avant… de prendre un chemin de traverse.
Lors de sa conférence de presse, le 25 avril 2019, il a essayé de rejeter le RIC en faisant valoir qu’une autre option était possible : le référendum d’initiative citoyenne, a-t-il dit, « me semble remettre en cause la démocratie représentative, mais je crois malgré tout que nous devons donner plus de place à la voie référendaire dans notre démocratie ». Le chef de l’État a donc annoncé qu’il allait simplifier « les règles en permettant que l’initiative puisse venir de citoyens, un million de citoyens qui signeraient une pétition, et qu’elle puisse prospérer en projet de loi et, si elle
n’était pas examinée par les Assemblées, aller au référendum ». Or, c’est très précisément ce qui est finalement advenu : les soutiens ont dépassé la barre du million évoquée par Emmanuel Macron, et pourtant, ce dernier n'a jamais fait comprendre ces derniers mois qu'il comptait tenir sa parole.
Une fois que la crise du coronavirus aura été surmontée et si les turbulences sur les marchés financiers ne sont que passagères – ce qui est loin d'être assuré –, le gouvernement pourrait-il donc reprendre son projet de privatisation ? Pour Emmanuel Macron, ce ne serait pas sans risques.
D'abord, il renierait cet engagement d'abaisser à 1 million le nombre de soutiens nécessaires pour
déclencher un référendum – mais il est vrai que dans le passé, il a souvent repris sa parole. Surtout, il prendrait le risque d'une nouvelle tempête politique. Il faut en effet dire les choses telles qu’elles sont :
dans les conditions très difficiles où elles ont été engrangées, ces signatures – à hauteur de 1,2 million –
constituent un formidable résultat. Elles sont le fruit d’une très forte mobilisation
citoyenne et révèlent un phénomène nouveau en France : la défense des biens publics est de plus en plus populaire dans le pays, la mobilisation autour d’ADP
constituant une sorte de point de rupture.
Dans le passé, on a senti en effet dans le pays beaucoup de colère et d’indignation au gré des privatisations qui se sont échelonnées tout au long des années 2000, d’autant qu’elles ont alors commencé à toucher non plus des sociétés commerciales, financières ou industrielles comme auparavant, mais des services publics. Mais comme la gauche et la droite ont fini par conduire les mêmes politiques de pillage des biens publics – un jour contre EDF, le lendemain contre
GDF –, les opposants ont eu, au début, du mal à se faire entendre. Mais progressivement, l’idée que ces privatisations étaient en fait des opérations de prédation conduites au profit des marchés financiers s’est imposée. Lancée par le socialiste Laurent Fabius, aujourd’hui président du Conseil constitutionnel, la scandaleuse privatisation des autoroutes, qui a offert des rentes Directeur de la publication
interminables et colossales à quelques groupes géants, tels Vinci ou Eiffage – n’a pas été pour rien dans cette prise de conscience. Et puis, un nombre croissant de citoyens a pris conscience que les gouvernements successifs, de gauche comme de droite, ont menti en prétendant que les déréglementations du rail ou du service postal n’avaient pas pour objectif la privatisation de la SNCF
et de La Poste, les deux services publics auxquels les Français sont le plus attachés.
Alors, d’un seul coup, la bataille autour d’ADP a pris une dimension qui a dépassé l’avenir de cette seule
entreprise. Elle a pris une valeur symbolique. Ce ne sont pas seulement les gilets jaunes ; ce sont aussi les manifestants contre la réforme des retraites ; ce sont les personnels hospitaliers qui, dans des centaines de manifestations, ont entonné le même slogan : « Quand tout sera privatisé, nous serons privés de tout. » Avec ADP, une sorte de cristallisation s’est réalisée. En cela, le résultat des soutiens à la proposition de loi référendaire n’est pas un échec, c’est tout le contraire : un point d’appui pour combattre la privatisation et la marchandisation généralisée… Car au milieu des années 1980, quand la vague des privatisations a commencé, la droite française, qui s’était convertie au néolibéralisme, en faisait un thème de campagne, et espérait faire rêver le pays en faisant miroiter la perspective du capitalisme populaire. Or, aujourd’hui, les partisans des privatisations sont en train de perdre la bataille des idées. C’est de cela aussi que témoigne la mobilisation autour d’ADP : le pays ne veut plus qu’on le dépouille des biens qui sont les siens. Et cela, le gouvernement l'a bien compris : c'est la mobilisation citoyenne qu'il redoute, plus encore que les turbulences sur les marchés financiers.
Directeur de la publication : Edwy Plenel
Direction éditoriale : Carine Fouteau et Stéphane Alliès
Le journal MEDIAPART est édité par la Société Editrice de Mediapart (SAS).


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